Ma démarche picturale consiste à créer des paysages semi-abstraits anthropomorphiques, en retravaillant la couleur dans un mouvement perpétuel, à partir d’une simple forme abstraite obtenue « aléatoirement » au couteau. J’utilise la technique de la dendrite comme base pour développer les formes du monde végétal jusqu’à leur rendre un caractère plus humain et spirituel (lien entre la nature et la culture).
La dendrite désigne habituellement une technique qui consiste à déposer, au hasard, de la peinture en tube sur une feuille de papier, puis de l’écraser avec une autre feuille ou une surface très lisse.
On peut alors voir la peinture s’écraser en formes végétales. L’objectif est de provoquer l’imprévu, tout en évoquant la figure d’un arbre (l’étymologie « dendrite » est proche de « Dendron », du grec ancien δένδρον « arbre »).
Ma technique de la dendrite est plus atypique : j’obtiens des formes et des couleurs aléatoires en glissant mon couteau pour écraser la matière multicolore. Plutôt qu’avec de l’aquarelle, je travaille avec de la peinture acrylique qui me permet de glisser sur la matière colorée. L’accent est mis sur la couleur, pure, jaillie du tube, chargée d’affectivité.
Je retravaille ensuite au pinceau les formes, en rajoutant d’autres éléments à mes paysages semi-abstraits, au gré de mon imagination. Le travail est conduit à mesure que j’enrichis, que j’oriente cette trace colorée. Ce premier geste inspiré au couteau, guidé par interaction intuitive, rejoint l’approche contemplative des orientaux, développée par Matisse dans « écrits et propos sur l’art », l’artiste éprouvant la sensation de monter avec l’arbre quand il commence le bas. C’est cette dimension spirituelle et onirique qui m’a attiré au départ, lorsque j’ai commencé à peindre des arbres… L’arbre est symbole du lien entre terre et ciel, tout comme le peintre tisse des liens entre les éléments. La peinture est pour moi une métaphore de l’arbre de vie, c’est une aventure dans l’imaginaire et la création éternellement renouvelée…
Mon objectif est de faire des liens, de construire des ponts, des passages entre les éléments, entre les dimensions. Montrer que tout est lié intrinsèquement dans l’univers, tout étant composé des mêmes éléments de poussières d’étoiles. Je recherche constamment à réduire l’écart qui sépare l’homme de son milieu naturel. La terre est l’homme/l’homme est la terre !
S’élaborant en se faisant, mes peintures acryliques ne sont pas préméditées, car je considère la peinture comme une expérience plastique interactive, un dialogue avec l’essence subtile des choses. Le sujet se dessine en se faisant, il construit sa propre réalité intrinsèque.
Je me laisse guider dans une sorte d’écriture automatique, vers un art à la fois “brut” et coloré de poésie.
J’aime laisser couler la matière, laisser libre champ aux « synchronicités plastiques », jouer avec les harmonies de couleurs, jouer de mon imagination… me laisser guider par le subconscient, les instincts, les coïncidences, avoir l’esprit en effervescence, les idées en arborescence !
La peinture fonctionne lorsque les éléments, tous liés entre eux, se font écho, lorsque je suis parvenu à fermer une boucle, au niveau sémantique et/ou esthétique. J’insiste dans mes peintures sur la fluidité des substances, la métamorphose des matières, le changement, la régénération, le cycle, la circulation, le mouvement, qui permettent un espace libre, une toile vivante, un regard onirique sur les symboliques de l’arbre de vie, la renaissance, l’éternel retour… Chaque toile symbolise des « arbres du destin », à la fois puisant leurs racines dans la source terrestre, et invitant à la reliance vers le céleste.